
Sonnet(III)
J’aime, de la nuit, le prélude, lorsque vous
venez,
Main dans la main et me prenez lentement,
strophe après strophe, dans vos bras.
Vous m’emportez, tout là-haut, sur vos ailes.
Amis, restez, ne vous hâtez pas
Et dormez contre mes flancs pareils aux ailes
d’une hirondelle fatiguée.
Votre soie est chaude. A la flûte d’attendre un
peu
Pour polir un sonnet lorsque vous me trouverez
secret et beau
Comme un sens sur le point de se dénuder. Ne
parvenant à arriver
Ni à s’attarder devant les mots, il me choisit pour
seuil.
J’aime, de la poésie, la spontanéité de la prose
et l’image voilée,
Dépourvue d’une lune pour l’éloquence :
Ainsi lorsque tu t’avances pieds nus, la rime
abandonne
L’étreinte des mots et la cadence se bris au
plus fort de l’essai.
Un peu de nuit auprès de toi suffit pour que je
sorte de ma Babylone
Vers mon essence — ma fin. Point de jardin en
moi
Et tu es toute,toi. Et, de toi, déborde le moi libre
et bon.
Mahmoud Darwich,
Le lit de l'étrangère, poèmes traduits de l'arabe (Palestine) par Elias Sanbar
chez Actes sud,2000, pages 29-30